Origine
ORIGINE
Deux vestiges de voie romaine se trouvent sur la commune, dans les bois de Crux, et entre la commune de Moussy et le domaine des Perrières. Une mosaïque fut découverte par un cultivateur qui nivelait son pré au Guérignault en 1871, à 20 mètres de la rivière Aron, à 35 cm de profondeur. Partiellement détruite par le propriétaire, elle fut préservée et recouverte après l'intervention de l'abbé Boëre, curé de Crux-la-Ville.
La commune se composait des 2 paroisses de Crux-la-Ville et Crux-le-Châtel, qui ne formaient qu'une seule seigneurie importante, et qui donna son nom à une ancienne famille. L’Évêque de Nevers, Bernard de Saint-Saulge, reconnaît dans des lettres de 1161, adressées au moine Bernard II, que les églises de Cruso-Villa et de Cruso Castro appartiennent bien à l'Abbaye de Saint-Martin d'Autun, dont il est l'abbé.
Il est fait mention de Crux Villa et Crux Castrum dans le registre-terrier de l'évêché de Nevers, datant de 1287.
L'histoire de Crux-la-Ville se confondit durant de nombreux siècles avec celle de la famille de Damas. En 1362, Hugues Damas, seigneur de Marcilly, devint seigneur de Crux par son mariage avec Philiberte de Crux. Une branche de la famille de Damas porta le nom de cette seigneurie qui fut érigée en comté au XVIIe siècle siècle.
Comme le démontre André Bossuat, les serfs de Crux refusèrent au XVe siècle les tailles et les corvées que leur seigneur, Jean Damas, exigeait d'eux. Ils les jugeaient excessives et déraisonnables :
- ceux qui possédaient bœufs et chariot devaient transporter le bois de chauffage au château ainsi que les provisions nécessaires, le vin, le grain, et même des pierres pour les réparations des bâtiments, et cela autant de fois que nécessaire ;
- ceux qui n'avaient ni bœufs ni chariot apportaient une charge de bois sur leurs épaules ;
- les serfs devaient une corvée d'un jour pour faucher les prés du seigneur ;
- ceux qui ne savaient pas faucher étaient employés à faner ;ils devaient cultiver les vignes et y faire toutes les façons nécessaires ;
- les habitants des Bordes devaient faire des haies dans la forêt et les entretenir pour permettre au seigneur de chasser plus commodément, ce qui les dispensait d'ailleurs d'autres corvées.
La taille était levée 2 fois par an par Jean Damas : à la Saint-Barthélémy et au mois de février.
Le seigneur exigeait également à titre de "champeage" une poule, un chevreau, de ceux qui élèvent des chèvres, un oison de ceux qui ont des oies, 4 deniers pour un veau et un porcelet de ceux qui élèvent des porcs. Les habitants lui doivent encore les dîmes des veaux et pourceaux nourris au lait, soit un denier par veau mâle et une obole par femelle, plus un porcelet sur dix.
Ceux qui se mariaient dans l'année devaient au seigneur un gâteau fait d'un demi-boisseau de froment et deux poules.
Enfin, ils étaient astreints au service du guet, jour et nuit, aussi souvent que le seigneur le jugeait utile.
Le procès qui débuta en 1440 s'acheva en 1464 par un arrêt du Parlement.
Au XVIIe siècle et XVIIIe siècle , les châtelains font œuvre "d'aménagement du territoire" en créant la Rigole de la Vaucreuse, qui alimente Paris en bois de flottage.
À la fin du XIXe siècle , la rigole d'Aron est tracée, destinée à alimenter le canal du Nivernais.
La commune fut rebaptisée Aron-la-Montagne à la Révolution.
Le site est riche en bois et forêts, investis par les résistants durant la Seconde Guerre mondiale.
Les maquis y sont alors nombreux, parmi lesquels figurent Mariaux, Daniel ou encore Camille.
Du 12 au 17 août 1944 eut lieu une bataille au cours de laquelle 1 500 Allemands appuyés par de l'artillerie et de l'aviation ne réussirent pas à réduire 800 maquisards encerclés.
Ceux-ci, aidés par les FFI du Morvan et les FTP du Val de Loire, décrochèrent après avoir fait subir des pertes sévères à l'armée allemande.
HISTOIRE
Selon Jacques Tirion, secrétaire de mairie de 1965 à 1989, l'origine du mot Crux serait gallo-romaine, du nom d'un homme qui y aurait implanté une villa: Crucium fondum. Puis vers 1100, l'appellation est devenue de Cruso.
Un inventaire des monuments préhistoriques et protohistoriques a été établi auquel l'instituteur de Crux Sylvain Commeau a répondu dans les années 1920/1930 : il a signalé des silex et un nucléus datant du moustérien localisés aux Faux et aux Maisons du Bois.
Au dessus de Challuée au lieu-dit "la Justice" un amoncellement d'énormes pierres plates grossièrement équarries fait songer à une construction de l'époque gauloise, selon l'ancien secrétaire de mairie Jacques Tirion.
De l'époque gallo-romaine ont été détectées des traces de voies romaines vers Les Perrières et dans les bois de Crux. Et en 1871 a été mise à jour un pavage en mosaïque à 35 cm de profondeur qui a fait l'objet d'un texte du curé Boère en 1872 ; la mosaïque a été recouverte sur place à cette date.
Jusqu'en 1791, le territoire de l'actuelle commune de Crux la Ville formait deux paroisses, celle de Crux-la-Ville et celle de Crux-le-Chatel. Ces deux paroisses ne formaient qu'une terre appelée la Terre de Crux, tout autant qu'une seule Seigneurie puisqu'elle donna son nom à une forte ancienne famille : les DAMAS puis une branche de la Maison Damas porta le nom de Damas Crux, seigneurie érigée en Comté au XVII° siècle, jusqu'à son extinction en la personne du duc Etienne-Charles de Damas décédé en 1846. A l'origine c'est Hugues de Damas, Seigneur de Crux en épousant en 1326 Philiberte de Crux, la famille de Damas régnait sur Anlezy, Lurcy-le-Chatel, La Montagne-Saint Honoré, Fleury la Tour, Saint Parize-le-Chatel, Menou, Menestreau, Colméry, Nérondes, La Collancelle.
La vie quotidienne à Crux-le-Chatel dans les années 1770 est évoqué à travers les carnets d'un nommé Claude Fleury, second homme de confiance du dernier comte Louis-Etienne de Damas-Crux (né en 1735 décédé en 1814 à Paris), publiés dans les Mémoires de la Société Académique du Nivernais 1985/1986. On y lit notamment que les châtelains avaient planté des mûriers.
Les restes du château au lieu-dit Le Berle ne donnent pas la mesure de ce qu'il était lors de sa reconstruction fin XVIII° siècle : il reste deux corps de bâtiment, des communs ; l'église encore visible avec sa belle porte d'entrée dans les années 1960 s'est écroulée petit à petit dans l'indifférence générale.
Une réalisation audacieuse des XVIIème et XVIIIème siècles s'est inscrite dans la topographie et le paysage cruxois, même si aujourd'hui elle se cache discrètement dans la forêt : il s'agit de la Rigole de la Vaucreuse, destinée à livrer le bois de chauffage aux parisiens.
Environ un siècle après le début du flottage des bois sur la Cure et sur l'Yonne, François de Damas-Crux sentit la possibilité de faire arriver à Clamecy les bois qu'il possédait en pratiquant depuis l'étang d'Aron un petit canal qu'il fit creuser à flanc de coteau.
La Vaucreuse était utilisée de la manière suivante : quand elle était à sec, le bois était jeté dedans et lorsque la quantité était suffisante on provoquait une crue en lâchant l'eau des étangs qui l'alimentaient. Le bois suivait la Vaucreuse par la forêt de Troncay jusqu'au hameau des Angles, les eaux rejoignaient alors le Beuvron puis l'Yonne à Clamecy où se formaient les trains de flottage.
On n'imagine pas l'intérêt patrimonial de ce système que l'on peut découvrir dans les forêts de Crux, commençant à l'étang de Ligny dont les eaux de déversement s'écoulent naturellement vers le bassin de la Loire. A cette ligne de partage des eaux une dérivation artificielle de la Resse déviait en cas de besoin les eaux vers l'étang de Fonds-Thomas. On peut voir entre ces deux étangs un point voûté de belle facture indiqué comme le " pont de Ligny " ainsi qu'en aval de Fonds Thomas un autre pont signalé par un panneau en bois comme le " pont de fer " : en fait la rambarde est en fer mais l'ouvrage, voûté également, est particulièrement intéressant par sa forme biseautée et il est accompagné en son aval d'une digue sur quelques mètres. Plus loin, dans le bois près d'Assarts, la Vaucreuse porte tellement bien son nom que la tranchée à son endroit présente un dénivelé de 16 mètres. Des ports existaient où étaient stockées les stères de bois : Ligny, Sausselas (orthographe de fin XVII° siècle), Aron et Les Angles.
La mise en fonction du Canal du Nivernais, dont le partage des eaux s'effectue à Baye à la sortie des " voûtes de La Collancelle ", a entrainé le creusement de la Rigole d'Yonne, et, par crainte de manque d'eau, de la Rigole d'Aron. Elle serpente dans les courbes de niveaux entre les Perrières, Assards, Le Clou, Les Troches, Moury et Vorroux, parsemée de ponts, tunnels et d'un ouvrage à trois arches dit des Trois gueules près de Jailly (commune de Bazolles) avant de rejoindre l'Etang de Vaux près de sa digue le séparant de l'étang de Baye.
A la fin du siècle des Lumières était édifié un autre élément du patrimoine lié à l'eau : le lavoir de la Grand'Fontaine à Crux-la-Ville. Cette architecture de pierres larges maçonnées est cousine et contemporaine du château des damas. L'édifice contenant la fontaine est une pure construction en pierre aussi étonnante que la vasque ronde du bassin (ancien abreuvoir) alimentant le lavoir lui-même. Les dix piliers de celui-ci semblables à ceux d'une halle reçoivent une charpente qui selon des anciens serait une réutilisation de celle de l'ancienne église de Crux-la-Ville ; elle est couverte de tuiles; Le lavoir a fait l'objet d'une restauration grâce à la Camosine en 1980.
Un inventaire réalisé en 1987 recense vingt et un lavoirs dans la commune, les plus remarquable ou pittoresques étant situés à Marmantray, les maisons du Bois, Les Faux (route des Maurois).
Il existe aussi une fontaine datant de 1664 en contrebas de l'Autrevelle, restaurée avec l'aide également de la Camosine en 1978.
Qui dit eau dit moulins : celui d'ARON est d'une importance incontournable surtout qu'il est l'un des trois dans la Nièvre à être toujours en activité en ce début de XXI° siècle ; datant du XIX° siècle avec en amont le vieux moulin pouvant remonter au moins au XVII° siècle. Celui du LANDAS était à l'origine un moulin foulonnier, la roue a été refaite en 1995. Il apparait sur la carte de Cassini de même que le moulin de Beaureplet aujourd'hui en ruine.
A la Révolution les deux paroisses fusionnent en une seule commune ARON-LA-MONTAGNE dénomination à rattacher certainement au courant révolutionnaire " montagnard " fort implanté dans la Nièvre. Le centre de gravité de la vie communale - on ne dit plus paroissiale - se déplace donc du château au bourg actuel. Le pouvoir spirituel aussi : sitôt après le coup d'Etat de Bonaparte, un curé revient à Crux-la-Ville. Au moment de la Restauration, c'est au retour des "émigrés", le Comte de Damas retrouve la Nièvre mais pas ses terres ni ses biens, vendus.
Pratiquement toute la période allant de louis XVIII à la seconde guerre mondiale pourra se résumer à des rapports de force entre trois composantes issues des Etats Généraux: le clergé, les notables et ... le reste de la population.
Au début du second Empire l'église de Crux-la-Ville avec sa nef du XVI° siècle et son abside romane est jugée alors trop exigüe et indigne ; elle est démolie et en 1865 remplacée par l'actuelle dont la longueur dépasse celle de la collégiale de Clamecy. La violente répression, à Clamecy justement, de la résistance contre le coup d'Etat de Napoléon III a eu des retentissements dans la population : cinq cruxois ont été impliqués, condamnés, incarcérés. Juste après le village connut une petite révolution contre le curé quand il s'est agi d'abandonner le cimetière qui ceinturait l'église pour le déplacer là où il se trouve maintenant. Un autre moment crucial pour le curé se produisit plus tard au moment de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905 où le curé Corbier fut chassé du presbytère et dut se faire héberger à St Saulge ; tous ces événements sont consignés dans le " livre de paroisse" rédigé de la main des prêtres successifs.
Crux-la-Ville apporta son lot de victimes aux deux guerres mondiales. Quand l'Armistice fut signé le 11 novembre 1918, la commune a compté 79 morts dont 51 domiciliés au pays même.
Un mémorial a été installé dans l'église en leur honneur au début des années 1920, qui a été réalisé par l'abbé Paul Renard curé de St Franchy. Cette œuvre a été inscrite Monument Historique en 2018 et restaurée en 2019.
La Résistance dans la Nièvre écrivit une de ses grandes pages entre le 12 et le 15 août 1944 dans les bois de Forcy à travers le Maquis MARIAUX : 22 maquisards y ont trouvé la mort. A Crux, le maire MAGNIEN, l'entrepreneur GAUGE et le curé MULOT durent creuser leur tombe le 14 août sous la menace de la Gestapo puis furent emprisonnés. Peu s'en fallut que le village ne connaisse le sort d'Oradour-sur-Glane si deux compagnies n'étaient arrivées le lendemain pour le libérer. Le 17 au matin le convoi allemand quittait les lieux, laissant 10 morts dans la population. Le récit de ces journées a été fait par l'abbé Mulot et est paru dans " Nous avions 20 ans " de J Y Debrousse et P. Ducros (1989).
C'est le 20 Novembre 1904, qu'a été mise en service la ligne de chemin de fer NEVERS SAULIEU via CORBIGNY, dit " LE TACOT"
Elle desservait deux gares sur notre commune : Les Ravées et Cloiseau cette dernière étant considérée comme la gare du bourg.
La fermeture totale de la ligne du Tacot est intervenue le 15 mars 1939.
En 1971 a été authentifié dans l'église un tableau de Philippe de Champaigne " l'Ange Gardien " (1654); il s'avère en fait qu'il est de son atelier ou de son neveu. Pour des raisons de bonne conservation il est en dépôt au musée de Nevers tout en restant propriété de la commune.
La salle paroissiale Notre Dame de Lourdes inaugurée en mai 1938 a été agrandie en 1994 pour devenir une salle polyvalente fort appréciée et symbole de la convivialité et de la douceur de vivre de Crux-la-Ville, . . . et de son nouveau dynamisme.
Le tourisme tend à se développer notamment autour du plan d'eau de l'Etang du Merle (18 ha) devenu base de loisirs avec location de canoës, pédalos et son camping trois étoiles de 7 ha équipé de chalets, auquel s'ajoutent gîtes et chambres d'hôtes aux environs. La pêche est l'un des atouts sur une partie de l'étang, rempoissonné de brochets en 2003.
L'événement annuel au Merle est le feu d'artifice musical du 13 juillet (5000 personnes en 2007).
Michel GEOFFROY, le 21 avril 2015
Joseph-Henri Léveillé
Joseph-Henri Léveillé est un médecin et mycologue français, né le 28 mai 1796 à Crux-la-Ville, aux Perrières, et mort le 3 février 1870 à Paris.
Il a étudié la médecine et la mycologie à l'Université de Paris, dont il est diplômé en 1824. Il a été le premier, dans un article de 1837 intitulé "Sur le hymenium des champignons", à proposer une description complète des basides et des cystides des champignons et à établir le rôle des basides dans la production des spores.
Il a aussi montré l'importance des basides pour la taxonomie et proposé la distinction entre ascomycètes et basidiomycètes.
La rigole d'Aron
PRESENTATION ET USAGE.
Un patrimoine oublié, commun aux trois communes de Crux la Ville, Vitry Laché et Bazolles.
Il s’agit d’une ancienne rigole construite pour compléter l’alimentation en eau du canal du Nivernais, essentiellement en période de sécheresse. Elle se déroulait sur un parcours de près de 25 km, se branchant sur l'Aron près de la sortie du moulin du même nom pour déboucher dans les étangs de Vaux et Baye après avoir serpenté à travers bois et prés en suivant les courbes de niveaux.
La rigole d'Aron, en chiffres, c’était encore, dans une note administrative du 15 mars 1943 : environ 100 ponceaux, 32 reversoirs, 24 déversoirs, 11 épanchoirs, 4 souterrains. Il reste encore de nos jours beaucoup de ces ouvrages d'art mais souvent délabrés par les années, étouffés par la végétation. Cette observation est le fruit d’une exploration effectuée à pied par quelques habitants de la commune de Crux au cours de l’année 2014, exploration pour le moins difficile dans certains cas du fait de la jungle forestière ponctuée de ronciers. A certains endroits l'ancienne rigole n'est plus visible, notamment dans les champs où elle a été comblée après le remembrement à la fin des années 1970 et au début des années 1980.
Un parmi la petite centaine de ponceaux typiques de la Rigole avec ses 4 bornes à chaque extrémité du tablier (ici dans le bois du Tremblot)
Mais pourquoi avoir construit cette rigole qui n'a débité de l'eau que pendant près de 25 ans seulement ? Quand le canal du Nivernais a été inauguré le 1er mars 1841, son alimentation a été immédiatement assurée par la Rigole d'Yonne issue du barrage de Pannecière, passant sur l'aqueduc de Montreuillon et arrivant à Port Brulé au point haut des 16 écluses. On a craint sous le Second Empire que l'alimentation en eau du canal par la seule rigole d'Yonne fut insuffisant, d'où l'idée de la compléter par des eaux venant du versant Loire en se branchant sur l'Aron.
Il faut, au passage, éliminer une confusion avec une autre rigole qui coulait sur les communes de Crux la Ville et Saint Révérien : La Vaucreuse. Celle-ci a été creusée dès le 17ème siècle sur l'initiative des Comtes de Damas-Crux pour le flottage du bois en direction des rivières Beuvron et Yonne. La rigole d'Aron ayant été mise en service en 1878, il faut faire le rapprochement avec le fait que le flottage du bois sur les "petites rivières" a cessé depuis 1891. A supposer que quelques bûches aient flotté sur la rigole d'Aron quelques années, il leur aurait fallu ensuite descendre dans l'étang de Baye, traverser celui-ci, puis passer sous les voûtes de La Collancelle, et franchir les 16 écluses de Port Brulé. Autrement dit, autant la Vaucreuse était faite pour le flottage, autant la rigole d'Aron n'a pas été conçue pour ça.
APPROCHE HISTORIQUE
Une recherche approfondie concernant cette ancienne rigole a été effectuée sur la base de documents d’archives : au Service des Canaux (VNF subdivision de Corbigny), aux Archives Départementales de la Nièvre (une pile de documents d'à peu près 50 cm de hauteur), au Service du Cadastre (Centre des Impôts de Nevers) et dans les trois mairies concernées.
Un décret impérial de Napoléon III du 10 Décembre 1868 signé au palais de Compiègne déclare d'utilité publique la construction de la rigole d'Aron, pour une dépense évaluée à 500 000 francs-ors, prise sur le budget des canaux. L'enquête publique avait eu lieu du 10 février au 12 mars 1861, suite aux expertises et relevés pratiqués sur le terrain l’année précédente. Le projet a été approuvé le 23 décembre 1868.
On trouve aux Archives Départementales dans la série 3S "rivières et canaux" (cotes 3S 4872, 4873, etc) toute une série de documents sur les expropriations et indemnisations. Les expropriations ont eu lieu en 1872 sur les communes concernées : Crux la Ville, Vitry-Laché qui s'appelait encore Laché-Assarts du nom des deux anciennes paroisses avant la Révolution, et Bazolles. Les adjudications se sont faites le 18 Août 1874 en trois lots : Assarts, Vorroux, Jailly. Au moment des travaux le maire de Crux demande que la longueur du ponceau de Vorroux sur la rigole pour le passage du CV (chemin vicinal) numéro 15 soit porté de 4 à 6 mètres.La mise en eau s’est faite en 1878.
Une fois l'ouvrage en activité, on trouve aux Archives un nombre impressionnant de requêtes de riverains. Par exemple celle du "sieur Gaujour" à Vorroux demandant la conservation d'arbres fruitiers dans l'une de ses haies concernées par la construction de la Rigole, ou, plus tard, un autre sieur Gaujour à Assarts qui se plaint qu'à cause de cette rigole les eaux du ruisseau d'Assarts refluent à certains moments dans un pré dont il est le propriétaire.
Mais, en raison du faible débit à la prise d'eau à moins de deux kilomètres de la source de l'Aron, la rigole n'a jamais rendu les services qu'on en attendait. Ce manque de débit a résulté aussi de la nature géologique des terrains traversés, de sa construction en déblai sur les 8/10ème de son parcours et de son faible dénivelé. De ce fait l’utilisation de cette rigole qui serpentait en ondulant paresseusement a été abandonnée depuis 1910. Et pourtant, elle fut entretenue constamment à la faux sur une bande de quinze mètres de large jusque dans les années 1925, aussi propre et nette que les allées d’un parc. L'entretien a cessé complètement depuis 1936, date de la mise en retraite du dernier cantonnier en fonction sur la Rigole.
Le 15 mars 1943 l'Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées de Corbigny rédige une note de 9 pages concluant à l'inutilité de la Rigole et sa remise aux Domaines, le remplissage de l'étang de Vaux étant jugé suffisant à l'apport d'alimentation du Canal au niveau de Baye. Dans ce rapport il évoque que même si l'Etat acquerrait l'étang d'Aron et même le moulin et même une arrivée directe dans l'étang de Baye tout cela serait insuffisant pour une utilité optimum de cette rigole.
Cependant une restauration sommaire commencée en 1948 sur les six derniers kilomètres a démontré que l'eau récupérée constituait un appoint appréciable pour l'Etang de Vaux. C'est à cette époque qu'il fut décidé que l'Etat conserve les 6 derniers kilomètres qui se trouvent sur le territoire de la commune de Bazolles et que soient remis aux Domaines la maison cantonnière et la rigole du km 0 (maison éclusière) au km 18,328.
Se concentrant sur les 6 derniers kilomètres, l'Etat propose alors leur remise en eau par les Ponts-et-Chaussées. Un curage a été demandé le 13 juin 1949 par les Ponts-et-Chaussées sur la longueur des 3 kilomètres nettoyés en 1948 .Mais le 22 mars 1950, le subdivisionnaire de Baye-La Montagne, se basant sur des calculs de la hauteur du déversoir, rapporte que la rigole a coulé pendant 11 jours en janvier, et qu’elle a fourni un faible débit dans l'Etang de Vaux par rapport à d'autres ruisseaux. A partir de ce constat, le subdivisionnaire suggère que l’une des causes pourrait être due au mauvais placement de l’échelle.
L'Etat continue à se dessaisir de la partie de la Rigole devenue inintéressante. Le 11 août 1949 le Ministère des Travaux Publics, Transports et Tourisme a déclaré inutiles au Service des Ponts-et-Chaussées : la maison d'habitation de la Rigole avec jardin et dépendances, ainsi que les terrains entre le kilomètre 0 et le PK (point kilométrique) 18.136, soit une superficie de 35 hectares. Le procès-verbal de remise aux Domaines de ces parcelles date du 24 juin 1950 .Monsieur Bernard Magnien, maire de Crux et monsieur Alexandre Chatré, maire de Vitry, par ailleurs propriétaires riverains, se sont déclarés intéressés par la totalité de la section sauf de la maison. Après l'établissement d'un cahier des charges de la vente, il a été demandé au Préfet de la Nièvre, par lettre du 13 avril 1951, de vouloir bien procéder lui-même à l’adjudication. La mise aux enchères a été proposée pour le 14 juin 1951. En fait la vente n'a pas eu lieu, indique le directeur de Domaines à Nevers dans un courrier du 7 mars 1952. Le 8 septembre 1952, le Préfet de la Nièvre adresse un courrier au directeur des Domaines à Nevers en vue de l'acquisition à l'amiable des terrains de la section déclassée par les mairies de Crux-la-Ville et Vitry-Laché ; la mise à prix initiale est de 195 000 francs. La commune de Vitry délibère favorablement pour l'achat à 125 000 francs, en date du 21 novembre 1952. De son côté, la commune de Crux propose ladite acquisition pour 95 000 francs, en date du 26 novembre 1952. Le 19 février 1953 les terrains sont cédés à l'amiable par les Domaines aux sommes qui ont été approuvées, 95 000 francs pour Crux et 125 000 pour Vitry, soit une somme globale de 220 000 francs.
Concernant la jolie maison éclusière de la Rigole, située au km 0, à la prise d’eau, dès le 20 octobre 1943, une note administrative attribuait son occupation temporaire au profit de l’entrepreneur Gauge de Crux-la-Ville pour 3 ans. Après la Guerre, des photos montrent des frises de bois sculpté tombant des toits qui étaient alors en place, ainsi que le dispositif de l’écluse envoyant l’eau dans la rigole. L’occupation temporaire par l’entreprise de BTP s’est prolongée puisqu’un de ses salariés (Auger) y était logé avec sa famille au début des années 1950. Par acte notarié du 16 avril 1953 chez Maître Belin à Saint Saulge, la parcelle contenant cette maison mise aux enchères, est vendue pour 150 000 francs à Louis Pilavoine épicier à Crux. Deux familles de locataires y ont été hébergées jusqu’en 1974 .La maison reste maintenant propriété de famille, par Denise, fille de Louis et épouse de Michel Lavest.
La commune de Bazolles reste donc à l'écart de ces transactions pour les terrains de la Rigole sur son territoire, puisque restant propriété de l’Etat, toutefois on trouve aux archives de VNF à Corbigny une proposition de remise aux Domaines de cette section restante à la date du 18 septembre 1967. Mais aujourd'hui la situation n'a toujours pas changé.
Par contre, la situation a encore changé pour les communes de Crux et de Vitry à l'occasion du remembrement : en 1976/1977 pour la première et en 1983/1984 pour la seconde. A partir de ces dates des sections de la Rigole ont été vendues à des propriétaires.
En 2014, dans les parcelles cultivées, on n'arrive plus à retrouver de traces de la Rigole (par exemple entre Mourry et Le Clou où elle a été comblée au bulldozer à la suite du remembrement), alors que dans les parcelles vouées à l'élevage, des ponceaux ainsi que des entrées et des sorties de souterrains ont subsisté comme entre Mourry et le Bois Malade. C'est dans les bois communaux que la Rigole est la plus accessible et visible et où les ouvrages d'art sont les mieux préservés.
STATUT FONCIER ACTUEL
- COMMUNE DE CRUX-LA-VILLE : les terrains de la Rigole sont la plupart privés depuis le remembrement ; ceux appartenant à la commune se trouvent essentiellement dans les bois et sont utilisés pour les affouages Les parcelles communales se situent :
- au Quartier du Loup (près de Mourry) parcelle ZC15 près du chemin du chêne Renon
- dans les bois de Vorroux : ZI 17,41, 83 et D 371, 373, 374, 419,420
Pour l’anecdote les merisiers des bois communaux de Vorroux ont servi pour le bardage de la salle des fêtes de Crux en 1993/1994.
COMMUNE DE VITRY-LACHÉ : la plupart des terrains où passe la Rigole sont privés sauf :
- de très petites parcelles restées communales : ZE 50, ZH 78 et 112
- la grande parcelle ZA 33 appartient au Département, car celui-ci est propriétaire du Bois Malade.
COMMUNE DE BAZOLLES : aucun numéro ne figure sur les parcelles où passe la Rigole, celle-ci étant restée, sur cette commune propriété de l’Etat, (VNF Voies Navigables de France).
POINTS D INTERET RESTANT VISIBLES ET ACCESSIBLES :
Ces ouvrages et constructions sont les suivants :
- la maison de la Rigole propriété privée mais que l’on voit très bien à droite de la route de Crux-Saint Révérien après le croisement "Moulin d’Aron";
- le tunnel des Perrières, en courbe et peu enterré, dont on aperçoit, depuis le chemin conduisant au domaine du même nom, une cheminée d’aération de 2 mètres de haut coiffée d’une belle margelle composée de 4 pierres en quart de cercle, d’un diamètre de 1m50 ;
- la sortie du souterrain au bord de la route après la dernière maison d’Assarts en allant sur Vitry, derrière une haie ;
- les ponceaux dans le bois du Tremblot et près de la fontaine des Courgiens au bord du chemin allant vers Le Clou ;
- les ponceaux et cheminées d’aération dans les bois communaux de Vorroux ;
- les cheminées d’aération de Jailly visibles depuis la route ;
- le pont monumental, dit des "Trois Gueules", accessible depuis Baye en prenant un chemin allant dans le bois en direction de Jailly ;
- le ponceau sur le chemin de randonnée entre la digue de Vaux et le camping de Baye
- l’arrivée de la rigole dans l’étang de Vaux et la vanne descendant dans l’étang de Baye.
PERSPECTIVES ?
Le désintérêt quasi-général qui se manifeste à l’égard de cette quantité d’ouvrages d’art qui menace de s’écrouler, alors qu’ils appartiennent à notre patrimoine, est malheureusement une situation que l’on rencontre trop souvent en bien d’autres lieux. Certes il n’est pas facile d’intervenir sur des terrains privés, les communes ne peuvent se charger financièrement en réhabilitant un patrimoine perdu dans les bois, quant à VNF, sa priorité est avant tout de maintenir la navigabilité des voies d’eaux en activité. Toutefois un attrait touristique se dessine au niveau supra-communal, car cette rigole a déjà fait l’objet de sorties et randonnées ; des projets de ce type sont en vue. Il peut être envisagé d’élaguer autour d’un ouvrage remarquable après les autorisations nécessaires, opération qui pourrait se mettre en œuvre sous la forme d’un chantier de jeunes. Après tout le Canal de Berry à l’abandon depuis des années, avec même des sections asséchées, revit à certains endroits de son parcours grâce à des actions touristiques.
Michel GEOFFROY à CRUX-LA-VILLE le 14 février 2015.
La Vaucreuse
Elément du système du FLOTTAGE DU BOIS vers CLAMECY puis PARIS
Les bois de Crux recèlent un patrimoine qui passe presque inaperçu. Témoignage d’une activité ayant duré plus de deux siècles : le flottage du bois.
Le système VAUCREUSE a constitué pour l’époque où il a été créé une véritable opération d’aménagement du territoire à une échelle correspondant aux critères d’aujourd’hui.
En effet, un siècle après que Jean Rouvet jetât le premier du bois de flottage dans la Cure en bas-Morvan, le comte François de DAMAS-CRUX ayant son château à CRUX-LE-CHATEL, aujourd’hui lieu-dit « Le Berle », a imaginé d’utiliser son domaine forestier d’Aron pour écouler ses bois à destination du chauffage pour les parisiens, en détournant des eaux du versant Loire.
Cet homme fait partie d’une dynastie comprenant des esprits éclairés et « avant-gardistes » pour l’époque (on cultivait le ver à soie à Crux-le-Châtel fin 18ème siècle). Il décida donc dans un premier temps de détourner les eaux des étangs de Chausselage et d’Aron coulant vers Decize pour les diriger au moyen d’un aqueduc en bois dans une tranchée appelée « La Vaucreuse » qui aboutit dans le Beuvron près du hameau des Angles commune de Saint-Révérien.
« Le 10 juin 1648 il chargea de son exécution Claude MARCEAU ingénieur et Léonard GOURY marchand de bois. Ils construisirent en outre un petit aqueduc en bois au dessous de la chaussée de l’étang d’Aron. Leur canal autour de la montagne, qui n’était d’abord qu’un fossé de 6 pieds, s’est tellement agrandi, par l’effet des eaux et du bois qui ont miné les terres, que dans la traversée du bois de Troncaye, d’environ un quart de lieue , il a maintenant plus de 80 pieds de profondeur et plus de 120 de largeur . Ce précipice se nomme la Vaux-Creuse et est redouté des ouvriers qui dirigent le flot . L’eau qui se rendait naturellement dans la Loire en suivant l’Aron, tombe dans l’Yonne. » (extrait de l’Annuaire du Département de la Nièvre pour l’An X )
En 1780 l’un de ses descendants Damas-Crux complète le système en alimentant la Vaucreuse depuis les étangs de Ligny et Fonds-Thomas jusqu’à Chausselage.(Archives Départementales de la Nièvre S 6904)
En prospectant le tracé de cette rigole, on découvre tout un cheminement parfaitement lisible bien inscrit dans le paysage forestier puisque par endroits la Vaucreuse est une véritable tranchée que la végétation n’a pas trop occultée. Son parcours serpente entre les étangs de Ligny et de Fonds-Thomas et croise à trois reprises la ligne dite ferrée où des ponts anciens subsistent mais souvent busés. En revanche le pont de Ligny en contrebas de l’étang, sur la Resse, rivière alimentant la Nièvre, est d’une belle facture architecturale avec sa voute très pure et sobre, sans parapet. L’ouvrage d’art le plus remarquable est sans conteste le pont indiqué comme « pont de fer » sans doute à cause de sa rambarde en retour qui le ceint comme un garde-fou côté amont. En aval, en continuité du pont, il existe une digue de renforcement qui ne manque pas d’intérêt.
Une association de Clamecy faisant des recherches sur les petites rivières alimentant l’Yonne autrefois pour le flottage du bois a identifié déjà cette portion de Vaucreuse comme un témoignage exceptionnel de cette activité passée et pense que les traces ici visibles sont tout autant intéressantes que celles existant dans la partie la plus connue du Morvan des grandes rivières du flottage.
Le "pont de fer"
Il n'est plus possible d'accéder à l'origine de la Vaucreuse par la route forestière entre l'étang du Merle et l'étang de Ligny. Il est recommandé d’emprunter un chemin balisé qui monte dans le bois après la stèle du Maquis Mariaux : utiliser la fiche « St Franchy-Moussy » du topo guide « Balades et Mémoire au Cœur du Nivernais » édité en 2004.
Les bois de Crux la Ville étant privés et exploités, il n'est pas garanti que tous les ouvrages d'art mentionnés soient encore dans leur état d'origine.
Michel GEOFFROY
Mémé Soudan (26 mars 1885 - 14 novembre 1963)
Madame Eugénie Soudan, née Corot le 26 mars 1885 et décédée le 14 novembre 1963. Durant la seconde guerre mondiale, cette agricultrice, veuve, a recueilli cinq enfants juifs dans sa ferme à Forcy.
Elle a hébergé également cinq autres enfants non juifs de la famille Adan.
Document tiré des "Vents du Morvan"
Feu d'artifice (Légende)
Voici pourquoi le feu d'artifice a lieu le 13 juillet et non le 14 ! !
FETE du 14 JUILLET ! ! !
Légende de Saint-Saulge : Le feu d'Artifice
- Je suis envoyé pour tirer le feu d'artifice.
- Oh ! Mossieu, i va ben, I l'on essayé hier, c'ai virot, c'ai tournot, c'ai zillet en l'air un vrai bombardement.
... Et c'est donc depuis ce jour que le feu d'artifice est tiré le 13 juillet ! ! !
Les cartes des "Légendes de Saint-Saulge" sont disponibles au Syndicat d'Initiative Coeur du Nivernais
Crux le Châtel
Vie quotidienne à la fin du XVIII siècle
Le territoire actuel de Crux-la-Ville comprenait avant la Révolution deux paroisses : Crux-la-Ville et Crux-le-Châtel.
Cette dernière avait pour centre le château, implanté au Berle. Ces deux paroisses formaient « la terre de Crux », gouvernée par une dynastie seigneuriale implantée depuis le XIV° siècle : les De Damas, qui devinrent au XVII° siècle les De Damas-Crux. Leurs possessions à Crux furent vendues comme bien national à la Révolution, sauf les bois que la Restauration (après Napoléon) rendit au marquis de Byron, gendre du dernier comte, qui racheta ensuite à différents particuliers les étangs, le moulin d’Aron et l’ancien presbytère.
La paroisse de Crux-le-Châtel regroupait les hameaux de Les Serrées, Ménétreuil, Ligny, Les Ravées, le Berle, Les Maisons du Bois.
LE DOMAINE SEIGNEURIAL lui-même comprenait le château dont il ne reste que le pavillon nord, le pavillon sud et les bâtiments d’exploitation (le corps de logis principal situé entre les deux pavillons ayant été rasé à la Révolution), le presbytère à 200 mètres au nord à l’endroit dénommé « La Cure » ou Le Pavillon », le cimetière de la paroisse autour du presbytère, et l’église accolée au pavillon nord, dans laquelle ont été enterrés, outre les seigneurs, certains serviteurs qui ont eu cette faveur.
Cette EGLISE était encore reconnaissable dans les années 1960/1970, mais la toiture avait commencé à se dégrader après la guerre de 1939-1945. Côté Est elle présentait cinq baies qui avaient été bouchées par des briques en 1880. Le portail nord surmonté d’un oculus, bouchés plus tard par de la maçonnerie, étaient la pièce maîtresse architecturale. Cette façade aurait mérité d’être conservée en la consolidant, mais son sort, comme le reste de l’église, est scellé depuis qu’un arbre a poussé au milieu de ce pignon nord.
Un FOUR BANAL existait au sud des dépendances : une carte postale du début XX° siècle en témoigne. Jacques Tirion, secrétaire de mairie jusqu’en 1991, a retrouvé un document précieux publié en 1986, par Jacqueline Baynac, historienne à Nevers : les carnets de Claude FLEURY(1742-1801), domestique élevé au château avec les enfants issus du mariage du comte Louis-Alexandre de Damas-Crux (photo du tableau le représentant) et de Marie-Louise de Menou.
CLAUDE FLEURY était devenu l’homme de confiance du COMTE LOUIS-ETIENNE DE DAMAS-CRUX jusqu’à l’émigration de celui-ci en 1792, car ce dernier était un proche du futur Louis XVIII. Claude Fleury ensuite fut procureur de l’éphémère commune de Crux-le-Châtel et acquéreur de biens nationaux du domaine. Sa chronique s’étend de 1768 à 1774 et nous décrit un mode de vie très évolué. On savait faire fructifier les richesses de la terre, dans une conception humaniste très représentative de l’esprit des « Lumières »… mais sous la férule du Château.
Les comtes avaient sous leur tutelle plusieurs citoyens et en élevaient d’ailleurs certains ; ainsi dans les années 1760 « un nègre de Guinée » confié à M. le curé par le comte, fut baptisé avec, comme marraine, Marie-Louise de Menou (archives paroissiales). Les notes de Claude Fleury décrivent donc la vie sous le comte Louis-Etienne, colonel d’infanterie souvent absent, comme son frère l’abbé François de Damas, résidant tantôt à Nevers comme vicaire général, tantôt à Crux. Le château a été reconstruit dans les années 1760, il y est fait référence dans ces carnets, notamment grâce au travail des carriers. Du site de l’Autrevelle, ont été extraites les pierres ayant servi à édifier le château de Crux le Châtel, les prés en bosses et en creux autour de l’Autrevelle en sont la trace.
Les châtelains possédaient tous les étangs de l’actuelle commune de Crux, y compris l’étang de Bicherolles qui allait jusqu’à La Queue de l’Etang, tout comme l’ancien étang de Beaureplé. Ils avaient en tout 17 étangs.
Comme cela a été présenté dans le numéro 72 d’Infos-Crux (mars 2015), les comtes de Crux-le-Châtel pratiquaient le flottage du bois coupé de leurs forêts destiné à Paris : au milieu du XVII° siècle, un premier détournement des eaux des étangs de Chausselage et d’Aron envoya par la tranchée de la Vaucreuse, le bois flotté à la rivière Beuvron, affluent de l’Yonne. Le système fut complété en 1780, par l’extension de la rigole de la Vaucreuse, en remontant jusqu’aux étangs de Fonds-Thomas et Ligny. A la fin de l’hiver étaient comptées les piles de bois destiné au flottage avant leur long voyage. L’exploitation de la forêt ne se borne pas à la coupe du bois, elle s’accompagne d’une véritable sylviculture, avec entretien de pépinières d’espèces variées, le bois demeurant une matière première essentielle ; parmi les plantations sont cités les ormes, les frênes, le blanc de Hollande qui serait une variété de tilleul.
La culture de la luzerne, exceptionnelle à cette époque, était pratiquée à Crux, afin de permettre la rotation des cultures en rompant l’obligation de la jachère triennale. La luzerne chez les Damas était utilisée pour le cheptel.
La pomme de terre a été expérimentée avec une variété locale mettant en concurrence celles d’Alsace et du Morvan.
On faisait pousser des orangers comme dans de nombreux châteaux pourvus d’une orangerie. Mais, la plus grande originalité d’alors, à Crux, était la plantation de mûriers du ver à soie. Le comte avait envoyé Claude Fleury dans les monts du Lyonnais pendant trois mois, pour l’initier à cet élevage. Au retour, il décrit sa pratique : « tout ce mois j’ay été occupé aux vers à soye et ils ont commencé à éclore le 20 de may , l’autre partie le 24 et ay finit de 7 juillet »(1773) et « des cocons j’en ay eu 182 sans être fournayer, après avoir fournayer 134 » (« orthographe » reproduite); suit la commercialisation du produit : « j’ay conduit mes cocons à Moulins » ; « à Nevers il a fallu 8 livres de cocons pour une livre de soye » (22 juillet 1773) .
Des superficies de terres étaient réservées aux chènevières. Le chanvre, semé d’avril à juin, puis cueilli en juillet-août, était mis à tremper : en 1773, le 19 juillet « nous avons mis notre chanvre dans l’eau ». Le rouissage faisait libérer la filasse utilisée pour la toile de ménage.
La pêche des étangs est mentionnée, notamment ceux d’Aron et de Bicherolles, mais également un autre hors territoire de Crux, l’étang Gouffier. Elle se faisait en octobre mais aussi en période de Carême, où le poisson se consommait le plus. Les étangs étaient vidés tous les trois ans ; ils étaient empoissonnés surtout de carpes forsières adultes mâles dits « au lait » et de femelles dites « aux œufs ». La pêche était gardée dans les viviers du château. Le poisson des étangs de Crux alimentait aussi les grandes villes : il était transporté par des bateaux appelés bascules, dont le fond était un vivier. Ceux-ci étaient présents sur l’Aron et la Loire (étude de L. Gueneau sur l’organisation du travail à Nevers aux XVII°/XVII° siècles).
La chasse était pratiquée pour le chevreuil, souvent mentionné, mais aussi le loup, qui, à cette époque, était en mesure de s’attaquer aux hommes ; ainsi, « de la nuit du 21 septembre 1773 au jeudi un mauvais loup a blaissé à la tête un nomé (orthographe reproduite) Germain Levêque de Cloiseau ; le loup a été tué au goyard » (goujard sans doute).
Claude Fleury était envoyé régulièrement aux foires, notamment de Châtillon, de Saint Révérien , de Champallement… Celle du bourg de Crux n’est jamais mentionnée. Les carnets font état de soins d’un « artiste-vétérinaire » à Crux, profession alors peu répandue.
Parmi les fêtes célébrées, sont notées celles de Carnaval et du mercredi des Cendres, qui étaient chômées. Les réjouissances étaient de mise, car succédait à ces deux jours la longue période de restrictions du Carême. Le dimanche des Brandons (fin de l’hiver) était noté comme une date importante du calendrier. Le jeu de quilles était, avec la chasse, la distraction la plus courante ainsi que les invitations à dîner ; le repas se prenait au début de l’après-midi et le souper assez tard dans la soirée. Les boissons signalées sont le vin, celui de Bourgogne venait de Corbigny, mais on buvait aussi du muscat (provenance non précisée), ainsi que la bière venant de Paris.
Ce journal quotidien d’avant la Révolution brosse le tableau d’une époque florissante dans les productions et cultures ; certainement que le territoire de Crux menait une vie assez privilégiée dans la campagne d’alors, où la plupart des citoyens avaient un travail ou une occupation, mais dans des conditions de liberté sans doute relatives ou peu enviables. Quant au terme « égalité » de la devise républicaine, il faudra attendre 1789 ! Et… pour celui de « fraternité », on ne sait pas, à travers le lourd travail de Claude Fleury, la question reste entière.
Michel Geoffroy 30/01/2017
Les croix
Au début du XXème siècle, les croix étaient bien plus nombreuses sur le territoire communal : il y en avait presque dans chaque hameau. Voir la carte ci-jointe de leur implantation, issue du mémoire d’étude de Michel Geoffroy « L’église et le village (1987) ». Aujourd’hui cinq croix subsistent.
Liste de pièces jointes
Soldats morts pour la France
La décision municipale d'ériger un monument aux soldats de la commune morts lors de la guerre mondiale de 1914-1918 date du 7 mai 1922. Les élus se sont prononcés en faveur du devis de 7790 francs présenté par l'entreprise de monuments funéraires Tixier de Nevers. Celle-ci avait déjà réalisé plusieurs monuments dans le département, dont celui de Brinon. M le Maire, Antoine Cougnard, a signé un traité de gré à gré avec l'entrepreneur, vu son "honorabilité".
Le monument aura été vite livré puisqu'il est inauguré le 30 juillet 1922 avant d'être complètement terminé. En effet, le 17 septembre, le conseil municipal vote un crédit supplémentaire pour les derniers travaux de maçonnerie, la pose de bornes aux 4 coins du monument avec une chaîne les reliant. C'est Henri Thionnet, maçon de la commune, qui fut chargé de ce travail (marché de gré à gré également) pour la somme de 3856 francs. En tout donc le monument aura coûté 11646 francs, soit 11,14 francs par habitant.
La réception du monument totalement achevé eut lieu le 12 octobre 1922 et, sur cette photo, on est en pleins préparatifs de la commémoration de l'Armistice du 11 novembre1918. Les personnes autour du monument en avaient terminé les décorations avec des guirlandes de lierre, des pots de chrysanthèmes et de la mousse.
A gauche nous avons, de gauche à droite : Andrée, Fernande et Joseph Lefloch, 3 enfants du sabotier Paul Lefloch alors installé face à l'école, ainsi que madame Commeau, directrice de l'école de filles.
A droite se tiennent, de gauche à droite, Marie-Jeanne Martin, de son nom de jeune fille, mère de Raymond Frébault, son fils Raymond, âgé alors de 9 ans, de qui vient cette photo, et madame Roblin adjointe à la directrice de l'école des filles.
Cette photo a été prise par Sylvain Commeau, directeur de l'école, qui a aussi mené des recherches sur l'histoire de Crux la Ville.
L'autre "monument" mémoriel de 1914-1918 se trouve dans l'église : il s'agit d'un tableau peint sur toile présenté dans une structure en bois sculpté, de 4,90 mètres sur 2,83 mètres, qui est l'œuvre de Paul Renard (1877-1963), curé de St Franchy de mars 1914 à sa mort en août 1963.
Aux dires de ceux qui l'ont connu il vivait comme un reclus : sitôt l'office religieux terminé il se retirait au presbytère pour s'adonner à ses deux passions favorites, la peinture et la sculpture. Il avait réalisé bien sûr pour l'église de St Franchy un mémorial en l'honneur des guerriers tombés pour la patrie en 1914-1918 mais celui-ci aurait disparu lors des travaux de restauration de la voûte de la nef vers 1974. Les autres mémoriaux réalisés par le curé Renard encore visibles de nos jours se trouvent à : St Saulge, le plus grand, mais démonté en plusieurs morceaux et relégué sur la tribune de l'église, à Ste Marie où il se présente en deux parties de chaque côté de l'entrée de l'église, à Moussy sur un mur de la nef comme à Garchy où il a été restauré (la signature Paul Renard est visible sur tous les panneaux).
L’évêque de Nevers s'est très vite préoccupé de l’hommage à rendre à tous les Nivernais morts pendant la guerre et dès le 29 mars 1919, «pour perpétuer pieusement dans les paroisses le souvenir des soldats morts au service de la France», il demande aux curés dans une lettre et ordonnance que soit apposé dans chaque église «un tableau ou plaque de marbre contenant la liste des soldats de la paroisse morts pour la France» (Semaine religieuse, n° 14, 5 avril 1919, p. 129-13). Des toiles sur ossature bois comme celles de Crux sont exceptionnelles et pourtant, après recherches aux Archives Départementales et Diocésaines, on ne sait presque rien sur leur installation dans les églises. Cela tient sans doute au fait que le curé de St Franchy exécutait ses œuvres dans la plus grande discrétion et humilité, sans rien demander. On imagine qu'il a fallu bien des bras le jour de la mise en place de ce lourd mémorial dans l'église de Crux. Encore en bon état de conservation en 2018, il a fait l'objet d'une restauration par Nathalie Guillaumot, restauratrice d'art à Narcy (Nièvre). Il a obtenu la reconaissance du Ministère de la Culture qui l'a inscrit comme Monument Historique par arrêté du 3 septembre 2018.
Après sa réinstallation, il a été béni le 11 novembre 2019.
Dossiers joints :
Discours de M. VACHER , Maire de la Commune, en août 1922 le jour de l'inauguration du monument.
Recherche effectuée le 07 novembre 2017 par Mr Michel PILLON : liste des morts de 14-18 avec les dates, lieux de naissance et de décès, le métier au moment du recrutement, parents...
Présentation du Mémorial lors de sa réinstallation.